“Vous avez déjà trois enfants” : Cette mère accouche seule dans un couloir d’hôpital d’un bébé mort né

Publié le 24 décembre 2020
MAJ le 26 novembre 2024

À cinq mois de grossesse, Fatoumata Silla a appris que le coeur de son bébé ne bat plus. Choquée, elle a enduré un calvaire éprouvant, sans trouver le moindre soutien du côté du personnel hospitalier. Pire, la femme a dû accoucher seule, dans le couloir d’un hôpital, et a entendu des paroles outrageantes, comme elle le témoigne au magazine Au Feminin. 

Fatoumata Silla, une femme qui réside à Dubaï et qui est venue en France chez sa soeur, a appris que son bébé était mort in utero. Désemparée, elle décide de se rendre à l’hôpital Jean-Verdier, à Bondy en Île-de-France, pour accoucher. Mais elle était loin de s’imaginer que le personnel soignant de cet établissement était à la fois incompétent et inhumain, comme elle le raconte au magazine Au Feminin.

Le médecin de Fatoumata était totalement insensible à son désarroi

Alors que Fatoumata était à cinq mois de grossesse, elle a appris que le cœur de son bébé s’était arrêté. Alors que la douleur d’une fausse est particulièrement éprouvante, la maman a été confrontée à un personnel soignant incompétent. En se rendant à l’hôpital pour faire une échographie, Fatoumata a remarqué que le médecin ne prenait pas sa souffrance au sérieux. “Les Africaines sont bizarres, elles vont se dire ‘parce que j’ai mangé un truc, j’ai perdu mon bébé’ ou ‘parce que j’ai monté les escaliers, j’ai perdu mon bébé’”, a plaisanté le gynécologue durant l’échographie. Choquée, la femme a tenté de garder son calme, tout en étant dans un état de chagrin inconsolable. “C’était difficile pour moi, parce qu’en face de moi, je vois mon bébé qui ne vit plus, qui ne bouge plus. Je n’ai pas envie de rigoler à ce moment-là”, déclare-t-elle.

Fatoumata accouche d’un bébé mort-né dans un couloir d’hôpital

Pour pouvoir accoucher de son bébé mort-né lundi, la femme a pris un traitement afin de “préparer le col”. Mais après avoir perdu beaucoup de sang et avoir subi d’atroces contractions, elle est revenue dimanche à l’hôpital. Paniquée, elle a demandé à la sage-femme de l’emmener en salle d’accouchement. Mais cette dernière lui a demandé de patienter pour qu’elle puisse prendre sa tension. “Elle m’emmène dans une salle pour prendre ma tension alors que je lui explique que je vais avoir le bébé maintenant”, s’insurge Fatoumata. Finalement, Fatoumata a accouché dans le couloir de l’hôpital. “À ce moment-là, je suis choquée, effondrée. Je retiens le bébé pour ne pas qu’il tombe par terre”, se désole-t-elle.

Le personnel soignant lui assène des paroles choquantes

On pourrait croire que c’était la fin de son cauchemar, mais ce n’était pas le cas. Alors que le deuil périnatal est une épreuve pénible, un gynécologue a tenté de “la consoler” en lui disant “ne vous prenez pas la tête, vous avez déjà trois enfants”.

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Les empreintes du bébé de Fatoumata – Source : Au Feminin

Après l’avoir examiné, le médecin lui a demandé “madame, est-ce que vous voulez voir le produit ?”. Sous le choc, Fatoumata comprend que “le produit” n’était autre que son bébé. “Je n’arrive même plus à parler, à pleurer, je suis comme anesthésiée, je me ferme, je me mets dans ma bulle”, raconte la maman horrifiée. Après avoir été victime d’un comportement irrespectueux de la part du personnel soignant, elle a demandé à ce qu’on lui amène son bébé dans un état convenable pour qu’elle puisse lui dire adieu avec son mari. “La sage-femme revient et nous dit “je vais le préparer mais par contre, je vous déconseille de le voir car ça sera plus une vision d’horreur qu’autre chose”, se souvient-elle. Ce manque de délicatesse vient approfondir la peine du couple. Enfin, lorsque les parents ont voulu quitter l’hôpital pour organiser les funérailles du bébé, ils ont demandé à récupérer son corps, ses photos et ses empreintes. Mais le personnel soignant semblait avoir perdu les photos.

 

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Face à ces négligences, Fatoumata a tenu à dénoncer ce manque de professionnalisme et cette apathie envers un couple endeuillé. Elle souhaite partager son expérience pour qu’aucune femme ne subisse un telle calvaire.

La fausse couche, une souffrance silencieuse

Une fausse couche est rarement un moment banal pour une femme. D’après le Pr Philippe Deruelle, obstétricien au CHRU de Lille, explique au Figaro que la fausse couche précoce qui se produit avant quatorze semaines de grossesse est fréquente et concerne près d’une femme sur quatre avant 39 ans. Mais pour une femme, cette interruption soudaine de grossesse peut engendrer une souffrance profonde. Selon une étude publiée dans le British Medical Journal, 39% des femmes qui ont enduré une fausse couche précoce subissent les symptômes d’un syndrome de stress post-traumatique. “Pour les médecins, ce n’est qu’un amas cellulaire. Mais pour les femmes, c’est déjà un bébé”, précise Nathalie Lancelin-Huin, psychologue et auteur de Traverser l’épreuve d’une grossesse interrompue. Dès les premières semaines de grossesse, la femme prend conscience qu’elle porte une vie humaine. Lorsqu’elle apprend que cette vie n’existe plus, elle peut avoir l’impression qu’on l’a amputé d’une partie d’elle-même. Parfois, une prise en charge est nécessaire pour accompagner la patiente et l’aider à traverser ce deuil particulier.