L’une des plus grandes revues scientifiques se pose des questions sur les vaccins anti-Covid-19

Publié le 3 décembre 2020
MAJ le 26 novembre 2024

A l’heure où la perspective d’un vaccin contre le Covid-19 approche à grands pas, certains scientifiques appellent à plus de transparence concernant les données. Parmi eux: le Dr Peter Doshi, éditeur associé au prestigieux British Medical Journal (BMJ). Le quotidien italien Il Tempo, qui a relayé ses observations, revient sur les annonces successives faites par Pfizer, Moderna et Astrazeneca sur l’efficacité de leurs découvertes. 

C’est dans un article paru le 21 octobre dernier dans la revue médicale britannique qu’un manque de données relatives aux vaccins est mis en avant. Signée par Peter Doshi, cette publication s’interroge sur l’efficacité de ce que l’on considère comme la “solution à la pandémie”. Et pour l’éditeur, certaines réponses manquent encore, indique Il Tempo.

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Des questions sur les vaccins anti-Covid – Source:  Dado Ruvic pour Reuters

Que signifie un vaccin “efficace” ?

Alors qu’Anthony Fauci, expert gouvernemental en maladies infectieuses et la direction de la Food and Drug Administration (USA) ont assuré que les procédures nécessaires seront suivies pour obtenir un vaccin “sûr et efficace”, en parallèle d’une déclaration signée par neuf laboratoires promettant de respecter des protocoles stricts, Peter Doshi s’interroge sur la signification d’un vaccin “efficace”.

En citant Peter Hotez, doyen à la National School of Tropical Medicine à Houston, il explique que le premier point est, idéalement, que le vaccin réduise la probabilité de tomber gravement malade et d’être hospitalié. Le second, c’est qu’il prévienne l’infection et de ce fait “interrompt la transmission de la maladie”. Pour autant, et selon l’éditeur, les essais actuels en phase 3 ne sont pas réellement conçus pour apporter des preuves à ces points. “Aucun des essais actuellement en cours n’est élaboré pour identifier une réduction de résultats graves tels que les admissions à l’hôpital, le recours aux soins intensifs, ou les morts. Les vaccins ne sont pas non plus étudiés pour déterminer s’ils peuvent interrompre la transmission du virus”, peut-on lire sur l’article.

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Peter Doshi, éditeur associé au BMJ – Source : Gladwyne

Des données qui manquent encore

Pour le Dr Doshi, il est légitime de se poser des questions sur la fiabilité des annonces faites par Pfizer, Astrazeneca et Moderna, d’autant plus que ces dernières semblent très optimistes, avec des taux d’efficacité déclarés supérieurs à 90%, précise Il Tempo. Dans ce sens, il appelle à plus de transparence sur ces données qui, “en plus de créer de grandes attentes dans un monde mis à genoux par l’épidémie de coronavirus, mettent également une forte pression sur les autorités”, poursuit le quotidien.

Interrogé par le BMJ au sujet d’une action préventive du vaccin sur les décès et les formes sévères du Covid-19, Tal Zaks, médecin-chef chez Moderna explique que les essais manquent d’une puissance statistique adéquate pour évaluer ces résultats. “Les admissions à l’hôpital et les morts dues au Covid-19 sont trop peu courantes dans la population étudiée pour qu’un vaccin efficace démontre des différences statistiquement significatives dans un essai de 30 000 volontaires”, révèle le BMJ, soulignant que le même principe s’applique à sa capacité de sauver des vies ou de prévenir la transmission du virus. “Les essais ne sont pas destinés à le découvrir”, peut-on lire sur cette même source.

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Vaccin développé par Moderna – Source: Time

“Est-ce que j’aimerais savoir si cela prévient la mortalité ? Bien sûr, parce que je suis convaincu que c’est le cas”, déclare Tal Zaks, puis d’ajouter, “Je ne pense simplement pas que cela soit faisable dans ces délais (de l’essai)”.

En résumant l’article de Peter Doshi, Il Tempo met également en avant le manque de spécifications plus détaillées, notamment l’efficacité des vaccins chez les personnes âgées, considérées fragiles face au virus, les performances du produit à 3, 6 ou 12 mois, l’aptitude à ne pas développer des symptômes plus graves ou à infecter d’autres personnes en cas de contamination et enfin, la possibilité d’effets secondaires indésirables. D’où la nécessité que la FDA et le National Health Institute évaluent ces résultats, précise Tal Zaks, ajoutant que “ce sera probablement une décision très difficile”.

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Vaccins contre le Covid-19 – Source: Entrepreneur

Que sait-on sur les vaccins anti-Covid ?

Selon un article de Ouest-France publié ce mercredi 2 décembre, l’une des questions qui revient le plus au sujet des vaccins concerne leurs effets secondaires. Un sondage BVA récent pour Europe 1 indique d’ailleurs que cela constitue la première cause de réticence chez les Français qui ne souhaitent pas se faire vacciner, ou du moins pas tout de suite.

Pour y voir plus clair, le quotidien fait donc le point sur ce que l’on sait ou ignore encore au sujet de ces produits. En commençant par révéler que oui, il y a aura bien des effets secondaires au vaccin, à l’instar de tout autre médicament, comme l’explique Anne-Claude Crémieux, professeure en maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Louis. Compte tenu des premières données, les effets généraux impliquent une fièvre, des douleurs articulaires ou musculaires, une fatigue et dans certains cas des frissons, a-t-elle poursuivi, soulignant que la quasi-totalité d’entre eux survient assez vite, dans les 40 jours suivant l’injection.

Ensuite, il serait établi que deux doses de vaccin entraînent plus d’effets secondaires qu’une prise unique, ce qui suscite d’ailleurs certaines craintes par rapport au fait que cela dissuade certaines personnes d’aller faire le rappel. Or, celui-ci est indispensable, déclare Christine Rouzioux, membre de l’Académie de médecine et professeure de virologie.

En outre, aucun effet indésirable grave n’aurait été répertorié, indique Ouest-France, soulignant que Moderna et le partenariat BioNTech/Pfizer n’ont connu aucune pause durant leurs essais. A l’inverse d’Astrazeneca par exemple, qui avait du interrompre les essais cliniques de son vaccin en raison d’une maladie “potentiellement inexpliquée” chez un participant, avant de finalement avoir le feu vert des autorités pour reprendre les tests.

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Une femme qui se fait vacciner – Source : Getty images

Ce que l’on ignore encore

La fréquence des effets secondaires ferait toujours l’objet de certaines interrogations. De même que la nature de ces derniers selon les différentes catégories de la population. “On n’a pas beaucoup de chiffres, quasiment rien par tranche d’âge… Il nous manque encore beaucoup de données”, déplore le Pr Rouzioux.

Le risque d’effets secondaires très rares n’est également pas à exclure, a-t-elle indiqué, expliquant qu’ “à partir du moment où on se dirige vers des millions de vaccinés voire des milliards, il faut s’attendre à voir apparaître des choses qu’on n’a pas vues lors de tests”.

A cet effet, la vigilance sera continue, même après la mise des vaccins sur le marché, souligne Ouest-France. Dans l’Hexagone, ce sera à l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) de prêter attention à de potentiels effets secondaires, une fois que les vaccins ont été validés par l’EMA, agence européenne du médicament. Au vu des enjeux, Jean-Paul Hamon, président de la fédération des médecins souligne que “les médecins généralistes seront en première ligne” pour faire remonter à l’ANSM tout effet secondaire fréquent et important, “comme c’est l’usage”. Le but étant d’assurer une vigilance continue et stricte pour rassurer la population.